Comme l’indique le dernier observatoire Abcis des productions animales françaises, la tendance est en légère décroissance hormis la volaille qui rattrape la chute des années antérieures liée grippe aviaire.
Cette tendance modérée à la décroissance cache certains facteurs qu’il faut souligner ici pour bien interpréter ces chiffres :
- Les prix de marchés de produits animaux ont été pour la plupart bien orientés en 2024 mais les aléas sanitaires et climatiques et la hausse des charges de structure se sont traduites par des évolutions des revenus hétérogènes selon les productions animales.
- l’offre nationale est bridée et contribue au soutien des cours. Les procédures et les normes d’agrandissement et de modernisation lourdes, longues et coûteuses découragent les éleveurs et empêchent la réalisation de leurs projets.
- L’envolée de la consommation des œufs et des volailles et le recul des productions sous signes de qualité (dont le bio) est la conséquence de l’arbitrage des consommateurs face à l’inflation des produits alimentaires et la réduction générale de leur pouvoir d’achat
- La démographie est très défavorable à une croissance future car toute une génération d’éleveurs se rapproche de la retraite alors que les candidats à la reprise se font rares.
- Malgré les forces anti-élevages qui déploient leurs arguments médiatiques, la consommation se maintient en France. Sans production suffisante, le marché français offre des opportunités aux pays concurrents qui grignotent des parts de marché, particulièrement en restauration hors domicile où l’origine France est moins visible.
Ce contexte de produits animaux plus rares et plus chers impose des surcoûts aux industries transformatrices qui doivent défendre leurs parts de marché face aux distributeurs toujours plus concentrés. Sur les marchés d’exportations restant soumis à la libre concurrence les positions françaises sont difficiles à défendre. De ce fait 2024 a été une année particulièrement difficile économiquement pour les abattoirs (bovins et porcins) comme pour les transformateurs charcutiers.
Les lobby anti-viande et anti-lait militent activement pour détériorer l’image santé et environnementale des produits animaux et font la promotion de produits végétaux transformés. La Cour de justice européenne leurs ayant même accordé, contre tout attente, l’usage des dénominations des produits animaux historiques pour leurs ersatz végétaux. Le nouveau nutriscore dégrade la note des produits animaux riches en protéines au profit des produits végétaux. Malgré ces coups de pouce, les alternatives à la viande ne passent pas l’épreuve du marché. Les stars des food-tech Ynsect (France) et Beyond meat (Etats-Unis) sont en grande difficulté.
La perte de compétitivité, multifactorielle, des filières animales françaises et leurs conséquences sur l‘économie des filières, en particulier la production et la transformation, est prise au sérieux par les autorités. Elles ont lancé une mission d’information parlementaire pour identifier les causes de cet affaiblissement et les moyens d’y remédier. Le Ministère prépare un grand plan de recherche appliquée « Ambition élevages » dont l’objectif est de soutenir et d’appuyer les filières vers les systèmes de demain
Si le défi démographique est relevé et si la modernisation des élevages est simplifiée la France pourra retrouver la compétitivité historique de ses filières animales.
Gilles Nassy