Une trêve estivale marquée par la hausse des prix

La hausse des prix du maïs et des tourteaux de soja initiée en juillet s’est poursuivie en août sur le marché national, 3.02 CNY/Kg pour le maïs et 4.67 CNY/Kg pour le soja. D’après l’USDA, la Chine devrait augmenter de près de 30 % ses importations de maïs pour la campagne 2023-2024 en réponse à une demande nationale en hausse (304 Mt contre 299 Mt en 2022-2023) et à des pertes au nord du pays causées par de violentes inondations. Avec des stocks de maïs qui représentent déjà 69 % de la consommation mondiale, cette dynamique haussière pourrait tendre le marché mondial et faire grimper les cours mondiaux. 

Importations de soja : vers un record ? 

D’après l’USDA, la Chine devrait atteindre un nouveau record pour ses importations de soja pour la campagne 2022-2023. En hausse de 14 % en cumul sur la période de janvier à juin 2023 par rapport la même période en 2022, les volumes importés devraient atteindre les 100 Mt. Après s’être largement fournie auprès des Etats-Unis (40 % de la hausse), la Chine s’est depuis le printemps tournée vers l’offre brésilienne profitant de prix plus compétitifs. Cette réorientation en faveur du Brésil devrait s’installer pour la campagne 2023-2024. Des perspectives de production mitigées aux Etats-Unis et au contraire plutôt favorables au Brésil font pencher la balance vers l’origine Amérique du Sud. La situation économique chinoise s’est toutefois aggravée ces dernières semaines et pourrait inverser cette dynamique. Un faiblissement des achats chinois pourrait avoir un impact baissier majeur sur les prix mondiaux. 

Dépendance au soja

Le prix chinois du tourteau de soja est assez stable ces derniers mois. La Chine reste tout de même très dépendante aux importations de graines. Les importations du premier semestre 2023 sont équivalentes à celles de 2022, 4ème année record en termes de volume d’importation de graines de soja.

Moins d’achats d’orge

La Chine ralentit ses achats d’orge. Les échanges mondiaux sont ainsi prévus en recul de 5% par rapport à la dernière campagne. La Russie est un grand fournisseur d’orge et les approvisionnements resteront importants grâce à d’abondants stocks de report. Pour autant le fonctionnement au ralenti du corridor en mer Noire, faute d’inspections russes, pourrait entrainer une réaction de la Chine, 1er destinataire de ces exportations avec l’UE.

Le choix du maïs brésilien

La Chine a de nouveau annulé un contrat d’importation pour du maïs d’origine étasunienne. Elle réarbitre son approvisionnement au profit du Brésil, plus compétitif. Ce changement pèse sur les cours américains alors que les prix nationaux du maïs chinois continuent leur baisse. Depuis janvier, les prix nationaux ont accusé une baisse de 5%.

Bonne récolte de blé attendue

La Chine attend une récolte exceptionnelle de blé cette année. Pour la campagne 2023/2024, l’USDA table sur une récolte à 140 Mt soit 3 Mt de plus que la campagne précédente. Cette situation permettra d’alimenter le marché intérieur, les fabricants d’aliment se portent d’ailleurs sur du blé plutôt que du maïs dans les rations au vu de la baisse des cours. Pour autant, de fortes pluies inondent la principale province chinoise productrice. Les blés commencent à germer alors qu’ils sont encore sur pieds. La qualité sera donc à surveiller dans les prochaines semaines.

Géopolitique des matières premières : le réchauffement des relations entre la Chine et l’Australie

Depuis la demande d’une enquête indépendante sur l’apparition du Covid-19 en Chine demandé par le premier ministre australien, les relations diplomatiques entre la Chine et l’Australie étaient très tendues. Aujourd’hui ces relations semblent se réchauffer et les céréales qui étaient les victimes collatérales des tensions diplomatiques entre les deux pays redeviendraient une monnaie d’échange.

Sanctions et droits de douane

À la suite de l’enquête indépendante demandée par l’Australie en mai 2020, la Chine, premier importateur d’orge australien (2Mt en 2019 passées à 0t en 2021), avait augmenté ses droits de douane de 80%. D’autres produits d’import ont subi ces augmentations : le blé, la viande bovine, le vin, le charbon. En Australie, des sanctions sur les technologies ont aussi été mises en place comme l’arrêt des investissements chinois pour le déploiement de la 5G.

Ces sanctions pénalisent fortement l’export australien, la Chine étant le premier partenaire commercial de l’Australie depuis 2007 avec presque un tiers des exportations totales australiennes à destination de la Chine. Ces dernières années, l’Australie est devenue un acteur incontournable du marché des grains avec une production et une capacité d’export en hausse. L’Australie produit aujourd’hui 10% de l’orge mondiale et 5% du blé mondial. Avant le conflit, 54% des orges importées par la Chine venait d’Australie et 10% de France.

Réchauffement en cours

Après un changement de gouvernement en Australie, une rencontre a eu lieu entre le nouveau Premier ministre australien et le président chinois. Le réchauffement entamé a déjà permis de nouvelles exportations de charbon vers la Chine et une accélération des exportations de blé qui ont été multipliées par 2 au premier trimestre 2023 par rapport à 2022.
L’annonce d’un accord sur l’orge est en attente, la Chine a trois mois pour réexaminer les droits de douane appliqués à l’orge. S’il advenait dans les prochaines semaines, cette annonce diplomatique rebousculerai les équilibres mondiaux nouvellement établis.

Conséquence sur les prix

Avec l’arrêt des échanges, l’Australie avait trouvé de nouveaux marchés au Moyen-Orient alors que la Chine s’approvisionnait en Europe avec de l’orge d’Ukraine et de France. Les exportations françaises d’orge et les prix nationaux en ont largement profité. La perte probable du marché chinois a entrainé le mouvement inverse. Depuis fin mars, l’orge française majoritairement exporté vers la Chine voit son prix et ses volumes envoyés à la baisse.
Cette réouverture de marché est conforme à la volonté de diversification des origines d’importations chinoises et de diminution de la dépendance étatsunienne. Pour autant, la recherche est toujours à l’autosuffisance et à l’utilisation de matière national dans le cadre de l’alimentation animale. Les niveaux d’import ne retrouveront peut-être pas la base des années précédant les tensions.

La mode des OGM

La production de colza et de soja OGM est encouragée par les autorités. La recherche se penche aussi sur la mise en place de formules moins consommatrices de tourteau de soja pour l’alimentation animale, toujours dans le but de limiter la dépendance aux importations. Du côté des céréales, la Chine pourrait planter 267 kha de maïs OGM dans le cadre d’un essai à grande échelle. La commercialisation d’OGM n’était pas jusqu’alors approuvée par les autorités bien que la recherche étudiait ces cultures céréalière OGM depuis plusieurs année.

Appétit pour l’orge française

Les exports d’orge français sont toujours dynamiques à destination de la Chine.  300 000 t d’orge ont été envoyées en Chine en janvier 2023 contre 65 000t en janvier 2022. Cette dynamique se confirme sur les premiers chiffres de février et mars. Ainsi FranceAgriMer a relevé de 200 kt le potentiel d’exports français vers les pays tiers à 3Mt (3,38 Mt lors de la précédente campagne). L’orge est aujourd’hui compétitive dans les rations animales face aux autres céréales.

La baisse des prix continue en février

Les prix du maïs et du tourteau de soja continuent leur baisse sur le marché national en février, 3,02 CNY/kg pour le maïs et 4,94 CNY/kg pour le tourteau de soja. La devise chinoise a changé de dynamique en février et se réévalue face au dollar américain, dopant les importations notamment en provenance de mer Noire. Outre Atlantique, les relations avec les États-Unis se sont encore refroidies à la suite de l’épisode des ballons. La Chine garde comme objectif de diminuer sa dépendance aux importations étasuniennes.

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