Défis des productions animales à 10 ans : enjeux et perspectives

L’élevage français est en pleine mutation, confronté à des défis multiples liés à la consommation, à la production, aux réglementations, à la démographie des éleveurs et à la transition environnementale. L’étude présentée lors du SPACE 2024, réalisée par ABCIS pour le Crédit Agricole (CASA), met en lumière les tendances clés de la production et la consommation et les perspectives à horizon 2033 pour les différentes filières animales.

1. Les productions animales françaises face à la concurrence et …

Une consommation* en évolution contrastée

Les tendances de consommation des produits animaux varient selon les espèces. Si les œufs et la viande de volaille continuent leur progression (+1,4 %), la consommation de produits laitiers stagne (+0,3%) et celle de viande de porc et de bœuf est en recul (-0,8 %). Les circuits de distribution sont également en pleine transformation, avec une hausse de la vente en restauration au détriment du segment à domicile. La vente directe représente une faible part du marché (2 à 4%).

Une production* nationale sous tension

L’évolution de la production diffère selon les filières. La production de volailles et d’œufs reste dynamique (> 1,2 %), tandis que celles des produits laitiers, de la viande bovine et porcine affichent un recul plus marqué (-1,6 % à -0,6% respectivement). La question de la souveraineté se pose sur des produits animaux dont les productions perdent en compétitivité, notamment en viande de volaille et en viande bovine.

*base 100 2023, projection 2033

Des politiques européennes environnementales ambitieuses mais contraignantes pour les productions animales

Les réglementations environnementales et climatiques prennent une place centrale dans les stratégies européennes. La PAC 2023-2027 affiche des objectifs environnementaux ambitieux. Les accords de libre-échange se multiplient (Mercosur) et exposent les productions animales nationales à des bassins plus compétitifs, notamment en volaille et en bovins.

Le carbone et l’environnement au cœur des stratégies

Les émissions de gaz à effet de serre (GES), principalement issues des ruminants, constituent une contrainte majeure. Tous les acteurs de la filière sont engagés dans une réduction de l’empreinte carbone, dans un contexte incertain sur les questions du coût de la décarbonation et les leviers d’incitations pour l’accompagner (futurs crédits carbones ?).

Le bien-être animal, une nouvelle exigence sociétale

Les réformes en matière de bien-être animal semblent impacter surtout les monogastriques (porcs et volailles). La mise en place de normes plus exigeantes, telles que la réduction de la densité et l’interdiction des cages ou les modifications des conditions de transport, entraîne une inflation inédite sur les coûts sur la production. Pour les bovins, les règles sur de l’écornage, le transport et le logement font l’objet de débats à fort enjeu avec les ONG toujours plus exigeantes.

Une verticalisation croissante des filières

Les filières animales connaissent une intégration verticale accrue, notamment en volaille et en porc, avec des contrats d’intégration et des cahiers des charges plus stricts. Le secteur laitier suit la même tendance avec des accords tripartites visant à sécuriser l’approvisionnement des opérateurs et les débouchés pour les producteurs. En viande bovine, à l’exception du veau de boucherie et de quelques catégories spécifiques de gros bovins, la contractualisation est minoritaire et le marché « spot » reste prédominant.

Un choc démographique dans l’élevage

Le renouvellement des actifs est un enjeu crucial : la moitié des éleveurs partiront à la retraite d’ici 2030. Sans remplacement suffisant le nombre d’exploitations diminuera inexorablement, notamment en bovins et en porcs.

Des revenus en dessous des attentes

Les performances économiques varient selon les filières. Les grandes cultures et la viticulture affichent les meilleurs résultats, tandis que le porc fait partie des meilleurs revenus et la volaille est en dessous de la moyenne. On constate que le bovin lait est en dessous de la moyenne mais qu’une amélioration est constatée ces dernières années sous l’effet de la demande mondiale en produits laitiers et l’offre limitée. Les revenus en bovins viande restent structurellement en bas de la hiérarchie des revenus agricoles français.

2. Perspectives par filière

Volaille : La consommation de poulet progresse et pousse vers un nouveau standard de production (standard+ et ECC). Les régions périphériques se développent.
Œufs : La fin de l’élevage en cage nécessite des investissements massifs. La production reste concentrée dans l’Ouest.
Porc : La spécialisation s’accentue avec une concentration des exploitations. La consommation évolue lentement et la production s’adapte.
Produits laitiers : La production recule mais la consommation se stabilise. Les exportations diminuent et le secteur fait face à un choc démographique majeur.
Viande bovine : La consommation de viande bovine s’érode, au profit de la volaille. L’engraissement en France pourrait devenir un levier pour maintenir la production et limiter les importations de viande dans un contexte de baisse du cheptel allaitant.

Conclusion

Face à ces mutations profondes, les filières animales françaises doivent s’adapter rapidement. L’innovation, la structuration des marchés et l’accompagnement des éleveurs à l’installation seront déterminants pour assurer la pérennité du secteur. ABCIS continuera d’analyser ces tendances et d’accompagner les acteurs du marché pour relever ces défis.

Accédez à la présentation

Les leviers de la décarbonation des élevages en France

Quels sont les leviers de réduction des émissions de Gaz à Effet de Serre (GES) pour les élevages et quels sont leurs potentiels ? Comment les mettre en œuvre, pour atteindre les objectifs à 2050 et créer un élevage plus résilient et durable ?

ABCIS a organisé une conférence de restitution des éléments clés de l’étude conduite sur cette problématique pour le Crédit Agricole.


Consultez la synthèse de l’étude

Hausse des abattages en Chine

Depuis janvier et jusqu’au mois d’août, les abattages en Chine ont fortement progressé. En 8 mois, la hausse est de +13,2% par rapport à l’an dernier. Le marché chinois souffre d’une offre élevée (+3,2% de production au 1er semestre 2023/2022), une consommation peu dynamique et une mauvaise rentabilité en élevage. Ces éléments incitent les éleveurs à vendre leurs porcs, concourant à une baisse des cours à la production.

Pression chinoise sur les importations européennes de porc

Les prix élevés pratiqués en Europe pénalisent les exportateurs sur le marché chinois qui compte bien imposer ses conditions. En effet, alors que la Chine a besoin d’importer un peu plus de volumes de viandes de porc et de coproduits, seuls les origines américaines et brésiliennes semblent en bénéficier. A titre d’exemple, les ventes espagnoles ont reculé de -7% sur le 1er semestre par rapport à l’an dernier, tandis que les exportations des USA vers la Chine ont bondi de +26%, de +17% pour le Brésil et de +76% pour le Canada.

Une conjoncture difficile pour la compétitivité du porc européen en Chine

Depuis de nombreux mois, le prix du porc en Chine chute de manière inexorable. Dans le même temps, les prix en Europe ont atteint des niveaux historiques, pénalisant la compétitivité prix des viandes européennes sur le marché chinois.

Dans un contexte de marché économiquement et sanitairement instable en Chine, les prix n’ont cessé de diminuer depuis de nombreux mois. L’épidémie de fièvre porcine africaine a été virulente cet hiver, nuisant aux performances productives. L’offre en porcs est élevée et la demande des consommateurs reste atone et peine à se relever. Les éleveurs chinois font de nouveau face à de lourdes pertes en élevage. Le gouvernement a ainsi renouvelé ses actions de mises en stock et les éleveurs réduisent leurs cheptels de porcs vivants. Ce contexte n’est pas réellement favorable à une reprise forte des importations du pays.

Actuellement les prix des porcs en Chine se situent à des niveaux quasi-équivalent aux prix européens, autour de 2,55€/kg. Les écarts de prix avec les viandes américaines et brésiliennes sont forts (plus d’un euro en moyenne). La situation pénalise les exportateurs européens. Au fil des mois, la part de marché des origines européennes sur le marché chinois n’a cessé de baisser. En janvier 2020, la zone UE-27 comptabilisait 56% des parts de marchés en Chine, contre 20% pour les Etats-Unis et 7% pour le Brésil. Depuis, le panorama des fournisseurs de la Chine a changé. Au cours du premier trimestre 2023, les viandes européennes ne représentent plus que 49% des approvisionnements de la Chine. Les Etats-Unis ont fait progresser leurs ventes et totalisent 16% des origines sur le marché chinois. Le Brésil, grand gagnant, a réussi a faire grimper ses parts de marché à 18% en moyenne.

Au-delà d’une compétitivité mise en difficulté pour les Européens, ces derniers auront aussi moins de disponibilités en porc à allouer au marché chinois, avec une production européenne qui chuterait d’environ -4% en 2023. A l’inverse, les Brésiliens qui continuent le développement de leur production profiteront le plus des opportunités chinoises, bien que restreintes.

Légère reprise des importations chinoises

Début 2023, le marché mondial du porc assiste à une reprise des importations de la Chine. Au cumul des deux premiers mois de l’année, les achats de la Chine ont progressé de 9,3% en volume. Tous les fournisseurs ne profitent pas de ce redéploiement de la demande. Les Européens, dont les prix du porc s’affichent bien au dessus des prix internationaux, sont pénalisés. Les exportations des Etats-Unis vers la Chine progressent de 36,5%, celles du Brésil de 38%, tandis que les envois de l’UE-27 sont encore en retrait (-8%).

Production porcine : quel avenir suite à cette année 2022 compliquée ?

En 2022, les importations chinoises de viandes et coproduits du porc sont retombées à 2,9 millions de tonnes, en baisse de plus de 34% par rapport à 2021. Bien qu’attendu, ce recul de la demande confirme la volonté pour la Chine de s’affranchir de la dépendance qu’elle entretient avec les grands exportateurs mondiaux sur le secteur agricole. Et malgré une année 2022 compliquée, l’avenir du secteur porcin restera fixé sur l’objectif de la souveraineté alimentaire du pays prôné par le gouvernement de Xi Jinping.

Une année 2022 plutôt mitigée

Le bilan de l’année 2022 est plutôt mitigé pour le secteur porcin chinois. La production de porc a bel et bien progressé (+4.6% en 2022/21), atteignant 55,41 millions de tonnes équivalent carcasse. Le nombre de porcs abattus s’élève alors à près de 700 millions de têtes d’après les données officielles (+4,3%). Cependant, l’année a été marquée par d’importantes fluctuations en termes d’offre, de demande, et donc de prix. Cette forte volatilité a été préjudiciable pour bon nombre d’éleveurs et d’entreprises.

Le premier semestre a été caractérisé par une hausse importante des abattages, sous l’effet de mauvaises conditions sanitaires en élevage durant l’hiver 2021/22. Les prix ont ainsi chuté en flèche à cette période (-44% au 1er semestre 2022/21). Cette mauvaise conjoncture porcine s’est aussi retrouvée liée à la flambée mondiale des prix des matières premières végétales, et donc des coûts de production. Les résultats économiques ont plongé dans le négatif pour de nombreux éleveurs chinois, entrainant une contraction des cheptels sur cette première partie d’année. Afin de réguler le marché, le gouvernement a mis en place une procédure de mise en réserve nationale quasi-automatique des volumes de porcs. Ces stocks ont pu ensuite être mobilisés au cours du second semestre lorsque la baisse de l’offre en porc s’est fait ressentir, permettant aux prix à la production de grimper de 53% au 2nd semestre de l’année par rapport à 2021.

Côté consommation, la demande a été mise à mal par l’inflation mais aussi par l’épidémie de Covid-19 et les diverses mesures gouvernementales visant à endiguer la propagation du virus. La traditionnelle saison du Nouvel An chinois propice à la consommation de porc a même été plutôt décevante pour les exportateurs mondiaux et les professionnels du secteur.

Un mouvement de restructuration qui se poursuit et des perspectives de croissance en 2023

Malgré cette année assez compliquée pour le secteur porcin en Chine, la filière continue de se développer. Depuis l’épidémie de FPA, l’élevage porcin a subi un grand mouvement de restructuration et de professionnalisation. En 2023, les analystes chinois estiment que les 20 plus grandes entreprises chinoises représenteront plus de 30% des abattages nationaux, et que la plupart afficheront d’importantes hausses d’activité (+25% en moyenne en 2023/22). Parmi ces groupes, Muyan Foodstuff, Wen’s, New Hope ou encore Zhengbang se placent au top du classement.

Du côté de l’élevage, si le cheptel truie s’est réduit durant une grande partie de l’année, les éleveurs ont tenté de consolidé leur troupeau en fin d’année. En décembre, le recensement officiel dénombre 43,9 millions de truies, soit une hausse de 1,4% par rapport à 2021.

Les analystes de l’USDA envisagent une stabilisation de la production et de la consommation en 2023, mais ces prévisions semblent trop prudentes. La restructuration du secteur porcin se poursuivra sans aucun doute en 2023, tout comme le développement de la production nationale, stimulés par un rebond de la consommation. Les perspectives de croissance économique pour la Chine en 2023 laissent en effet entrevoir une reprise des activités dans de nombreux secteurs, et en particulier dans celui de la restauration. Ceci devrait stimuler la demande en viande de porc. Par ailleurs, les stocks nationaux de matières premières sont actuellement au plus haut, ce qui devrait permettre un meilleur contrôle des prix et des coûts de production.

2023 : la stabilisation des approvisionnements et du marché du porc est un enjeu prioritaire

L’année 2022 aura été marquée de nombreuses mesures gouvernementales appliquées pour contrôler l’inflation dans le pays. Parmi celles-ci, l’utilisation d’une réserve stratégique de viande de porc a été plusieurs fois mobilisée dès le franchissement d’un seuil d’alerte basé sur le prix du porc et des céréales. L’année 2023 a d’ailleurs débuté sur la mise en réserve de produits porcs congelés dès le 17 février, en lien avec une chute inarrêtable des prix et une demande peu dynamique des consommateurs en début d’année. La stabilisation des prix et des approvisionnements demeure un enjeu majeur pour le marché du porc.

Ainsi, dans la poursuite des déclarations faites par le gouvernement chinois lors du 20e Congrès national du Parti communiste en septembre dernier, une feuille de route des autorités a été publiée mi-février. Cette dernière définit des dispositions spécifiques pour assurer la « revitalisation » des territoires ruraux et accélérer le renforcement du secteur agricole chinois. De nouveau, la sécurité alimentaire est présentée comme une priorité absolue. Pour le secteur porcin, l’objectif est de stabiliser le cheptel autour de 41 millions de truies. Les autorités souhaitent renforcer les outils de surveillance du marché dans le but de limiter une volatilité trop importante des prix et des fluctuations en termes de production porcine, mais aussi de maintenir le revenu des éleveurs chinois.

Les performances et la productivité en élevage sont aussi au cœur des dispositions gouvernementales chinoise. Pour ce faire, la biosécurité est un autre enjeu mentionné dans les plans 2023 du gouvernement. Les autorités souhaitent renforcer la prévention et le contrôle des maladies animales, dont la fièvre porcine africaine. L’accent a aussi été mis sur le développement des technologies et de la recherche scientifique aux profits de l’agriculture. Ceci s’illustrera, entre autres, par la construction d’élevages sur étages modernes, standardisés, et contrôlant l’alimentation des animaux et les impacts sur l’environnement.

Ces quelques exemples ne sont qu’un court extrait de l’ambitieux plan 2023 du Ministère de l’Agriculture et des Affaires Rurales, et pour la première fois la production porcine était clairement évoquée, signe du rôle majeur du secteur dans l’économie et la politique de la Chine. Mais ce plan reste dépendant de la situation économique globale du pays, dont la croissance pourrait être perturbée par une éventuelle reprise de l’épidémie de Covid-19 ou encore une aggravation non prévue de l’inflation.

Le gouvernement chinois tente de soutenir la consommation

À l’approche des festivités du Nouvel An chinois, le gouvernement a annoncé la remise sur le marché des réserves de porc stockées. Les autorités du pays ont aussi déclaré vouloir mettre en place diverses mesures afin de soutenir la consommation intérieure.
L’enjeu est de stabiliser les prix, mais aussi de faire repartir l’économie du pays, toujours perturbée par la Covid-19 et les aléas climatiques.

© ABCIS 2022 Mentions légales