Quelle est la situation du secteur laitier chinois ?

La production de lait demeure dynamique cette année mais pourrait, elle aussi, être impactée par une météo estivale très chaude et des marges des éleveurs dégradées.

Les regards sont tournés vers les importations chinoises qui sont en net repli cette année 2022. Quelles sont les perspectives de demande ?

Production laitière toujours croissante

La production de lait en Chine est très dynamique selon les statistiques nationales. En hausse de +9% l’an passé, elle afficherait une croissance de +5% /2021 sur la période janvier-juillet 2022 selon BOABC. Les statistiques nationales seraient plus optimistes avec une hausse de +8,4% sur le premier semestre selon NBS. Cette croissance serait due à un cheptel plus important et de meilleurs rendements.

Toutefois, les conditions climatiques de l’été ont également été particulièrement chaudes et sèches, ce qui peut avoir touché la production de lait comme de fourrages.

Les prix du lait en Chine enregistrent une baisse depuis le début de l’année civile qui peut s’expliquer par la hausse de la production locale et par une demande intérieure plus faible due au covid-19 et notamment aux confinements dans les grandes villes.

Toutefois, sur la fin du mois d’août dernier, les prix du lait ont légèrement augmenté, d’1 cent de RMB/kg de lait. Si ce changement de tendance doit être consolidé dans les semaines à venir, cette augmentation pourrait être juste saisonnière ou signifier soit une reprise de la demande intérieure et serait donc une incitation à la production, soit un indicateur de baisse des volumes de lait. Quoi qu’il en soit, si la hausse des prix est durable, elle sera la bienvenue pour les éleveurs qui souffrent en Chine également de couts de production élevés, notamment coût d’alimentation (tourteau de soja).

Si la hausse du prix se poursuivait et sous réserve d’une météo favorable, la production laitière pourrait donc poursuivre sa croissance dans l’empire du Milieu. Rabobank l’estime à +5% au second semestre 2022 si les marges des éleveurs ne sont pas écrasées davantage.

Fabrications de produits laitiers – Source : CLAL

Malgré l’accroissement des volumes de lait, les fabrications de produits laitiers n’auraient progressé que de +1% sur le premier semestre 2022 /2021. En effet, les mois de mars et avril sont ressortis en retrait par rapport à l’an dernier. Cela serait dû à des difficultés logistiques et de main d’œuvre à la suite des confinements stricts imposés face au covid-19 et. Le recul de la production en juillet et août pourrait découler de la météo estivale défavorables et des marges dégradées.

Importations en net retrait

Les importations d’ingrédients laitiers sont inférieures à l’an passé. La hausse de la collecte intérieure, les difficultés logistiques mondiales et les moindres disponibilités chez les exportateurs conduisent à un repli des importations de lait liquides, de -26% /2021 de janvier à juillet, principalement en provenance d’Allemagne et de Nouvelle-Zélande. Les importations de matières grasses, crème (-9,5%) et de beurre (-2%), résistent mieux. Seules les importations de lait infantiles se rétablissent et dépassent légèrement (+3% sur janvier août leur niveau de 2021.

Les exportateurs de poudres maigres et grasses ne sont pas touchés de la même manière. En poudres grasses, la Nouvelle-Zélande qui fournit 90% des importations chinoises, a réduit de 111 000 t, soit -18%, ses livraisons à 510 000 t sur la période janvier-aout. Au vu de l’importance du volume en moins qui s’ajoute à des baisses de demande notamment du Sri Lanka, la Nouvelle-Zélande n’a pas pu substituer ces tonnages et les exportations sont en baisse de -18% sur la même période. La moindre demande a entrainé une chute des prix des poudres grasses en Nouvelle-Zélande, au point de devenir mois chères que la poudre maigre.

Sur la poudre maigre, les parts de marché sont mieux réparties mais la Nouvelle-Zélande fournit tout de même 40% des importations chinoises. Malgré le recul des ventes Chine, la Nouvelle-Zélande a su trouver de nouveaux marchés en Asie du Sud Est où ses exports sont en hausse de +4% sur janvier-août /2021. Pour les États-Unis, la Chine représente seulement 6% de leurs envois, ce qui est modeste et influe peu. En revanche, la compétition entre la Nouvelle-Zélande et les États-Unis a des répercussions sur les prix, qui ont d’ailleurs baissé dans ces deux bassins. Enfin en Europe, la moindre demande de la Chine s’accompagne d’une moindre offre, ce qui a un impact relativement modéré sur les prix.

Pourquoi la Chine importe-elle moins ?

Si la baisse de la demande chinoise est relativement importante d’une année sur l’autre, cela tient aux importations exceptionnellement élevées en 2021. Les volumes importés en 2022 sont assez proches de ceux de 2020.

En 2021, Les importations supplémentaires avaient surtout étoffé les stocks comme le montre le graphique ci-dessous. La moindre présence aux achats cette année permet donc de déstocker. Au vu des prix élevés de la poudre maigre et des stocks encore relativement élevés, les acheteurs chinois peuvent encore patienter. 

Pour autant, toujours selon les chiffres de BOABC, la consommation domestique semble marquer le pas ces derniers mois. La demande chute sous la courbe de tendance en mars au moment du confinements de grandes villes comme durant la première période de confinement au début 2020. Une partie de la poudre maigre est utilisée dans les restaurants, qui peinent à retrouver leur clientèle même quand les confinements sont levés dans les villes.

Dans ce contexte, il parait encore trop optimiste d’envisager un rebond des importations de poudres de lait d’ici la fin d’année 2022.

© ABCIS 2022 Mentions légales