Les grands producteurs chinois ont subi de lourdes pertes en 2021

D’après le classement des plus grands producteurs mondiaux établi par l’entreprise Genesus, certains grands producteurs chinois ont dû réduire leur cheptel truies sous l’effet de lourdes pertes financières en 2021. Le cheptel truies du groupe Wens Food, classé au 4e rang mondial, a reculé de 700 000 têtes, et s’élève désormais à 1,1 M de truies. Les concurrents suivants Zhengbang Group et New Hope Group ont eux aussi connu des réductions du nombre de truies, de l’ordre de 200 000 têtes chacun. Les entreprises chinoises dominent toujours ce classement.

Le cheptel truies repart à la hausse après 10 mois de baisse

Au mois de mai, le cheptel de truies reproductrices s’est relevé (+0,4% en un mois), pour atteindre 41,92 millions de têtes. Sous l’effet d’une recrudescence de la pression sanitaire et d’une situation conjoncturelle difficile pour les éleveurs chinois, les cheptels affichaient des reculs depuis le mois de juillet 2021. Cependant la remontée récente des cours pourrait inciter les éleveurs à repeupler leurs élevages de truies.  

Divergence dans les chiffres d’export et d’import de viande vers la Chine

Les statistiques des Douanes chinoises et celles de son principal fournisseur, le Brésil, continuent de diverger. Sur les 4 premiers mois de 2022, la Chine a en effet annoncé un recul conséquent des importations de viande bovine désossée avec seulement 723 300 téc importées (-17% /2021) dont :

  • 270 000 téc depuis le Brésil (-34% /2021),
  • 136 000 téc depuis l’Argentine (-24%),
  • 104 000 téc depuis l’Uruguay (+29%).

Du côté du principal exportateur du Mercosur, le son de cloche est un peu différent. Sur les quatre premiers mois de 2022, les douanes brésiliennes font état d’une hausse conséquente des exportations de viande bovine désossée à destination de la Chine continentale. 444 000 téc auraient ainsi été expédiées d’après les Douanes du Brésil (+37%).

Et les données préliminaires pour le mois de mai 2022 semblent confirmer cette progression côté brésilien avec 125 000 téc de viande bovine désossée exportée vers la Chine continentale (+42%).

Pour le mois de mai, d’après les statistiques chinoises, les importations de l’ensemble des viandes n’ont atteint que 590 000 tonnes de produits (-25% /2021). Et sur les 5 premiers mois de 2022, la Chine aurait importé quelques 2,85 millions de tonnes de viande (-34% /2021). Si la Chine ne fournit pas la ventilation des importations par type de viande dans la publication de ses données préliminaires, il semble que cette forte réduction soit d’abord liée à la baisse des importations de porc. Mais, d’après les autorités chinoises, la viande bovine est également concernée.

Si les données d’importations et d’exportations ne sont évidemment pas directement comparables eu égard notamment au transit des viandes qui prend plusieurs semaines, les écarts soulèvent de nombreuses questions. Il est cependant probable que la vague de Covid-19 et les confinements successifs ayant affectés plusieurs provinces de la Chine continentale aient eu des effets sur la vitesse de déchargement des containers et des enregistrements en Douanes côté chinois. Les prochains mois devraient permettre d’éclaircir la situation. En attendant, le Gouvernement chinois a rappelé que la transformation et la distribution de la viande dans le pays restait une priorité absolue. En juin 2022, le planificateur de l’État du pays a annoncé que le pays avait alloué 1,4 milliard de yuans (environ 200 millions €) pour soutenir l’amélioration des structures de la chaîne du froid et la construction d’un centre de logistique public au cours de cette année. D’après la Commission nationale du développement et de la réforme, les fonds seront principalement investis dans des projets d’installations logistiques, de transformation et de distribution ainsi que des entrepôts publics de stockage respectant à chaque étape la chaîne du froid. Cette annonce a été faite alors que les transports et la logistique ont été fortement affectés à travers tout le pays par l’accélération de la pandémie de Covid-19.

Du mouvement sur les importations chinoises en génétique avicole

La Chine importe les poussins reproducteurs (grands parentaux) pour sa génétique. Sur les 5 premiers mois de 2022, les importations sont à leur plus bas niveau depuis la FPA, avec une baisse de -26%  par rapport à la même période en 2021. Après avoir perdu cette place, les Etats-Unis redeviennent le premier fournisseur de la Chine en génétique après une absence de plus de 7 ans (+81% 5M 22/21) tandis que la Nouvelle Zélande perd le marché chinois (-90%).

L’alliance Brésil-Chine

Depuis le début du conflit russo-ukrainien, l’Ukraine, fournisseur de 30% du maïs importé chinois, n’est plus en mesure d’envoyer des cargos vers la Chine. Pour palier à ce manque et diversifier ses sources d’approvisionnement, Pékin a commandé 500 000 t de maïs brésilien. Le Brésil était quasiment absent des sources d’approvisionnement de la Chine depuis une dizaine d’années. Ces deux grandes puissances agricoles envisagent aussi de favoriser l’export de tourteaux de soja et de sorgho vers la Chine.

Hausse continue du maïs

Les prix nationaux du maïs sont encore en hausse ce mois-ci. Malgré la réouverture du port de Shangaï, les échanges sont encore ralentis. La mauvaise récolte de blé chinoise (-2%/2021/2022) a reporté la demande sur le maïs, ce qui tend le marché. La dévalorisation du yuan face au dollar permet tout de même de rentre compétitif certaine exportation.  

Croissance à deux chiffres des résultats des transformateurs chinois

L’année 2021 a été très positive pour le secteur laitier chinois, après une année 2020 perturbée par le Covid. Les deux transformateurs leaders, Yili et Mengniu, ont affiché des chiffres d’affaires et surtout des bénéfices en forte hausse (respectivement +23% et +43%). Ils creusent ainsi l’écart année après année avec leurs concurrents, menant à une concentration importante de la transformation laitière en Chine. Ces deux entreprises représentent déjà 48 % des parts de marché du lait et des boissons lactées et 54 % des produits fermentés.

Présenté par Jean-Marc Chaumet (CNIEL) lors de la conférence des Marchés Mondiaux de l’Idele.

Leur chiffre d’affaire, centré sur le marché chinois, leur permet de se classer parmi les 10 premiers transformateurs mondiaux : Yili apparait en effet au 5ème rang mondial tandis que Mengniu arrive à la 9ème place des entreprises mondiales de transformation laitière selon le classement de Rabobank pour 2021.

Hausse des exportations de viandes bovines de l’Amérique du Sud vers la Chine

Plusieurs échos font état d’un ralentissement des échanges de viande vers la Chine où les confinements se sont multipliés en lien avec la stratégie « 0 covid » du gouvernement. Les difficultés rencontrées au port de Shangaï en attestent.  Mais malgré quelques soubresauts, les exportations de viande bovine vers la Chine continentale sont restées soutenues depuis le Mercosur, principal fournisseur. Entre janvier et avril 2022, la Chine continentale maintenait son leadership incontesté dans le classement des principales destinations des exportations de bœuf argentin : environ 137 000 tonnes de produits (dont une partie de viande réfrigérée) y ont été exportés, soit 74 % du total des exportations. C’est +10% qu’un an auparavant.  Idem pour le Brésil qui a exporté sur 4 mois 341 000 tonnes de viande bovine contre moins de 250 000 tonnes il y a un an (+37%). Le constat est le même pour les exportations depuis l’Uruguay d’où 127 500 tonnes ont été exportées sur la période (+42% /2021).

La Covid-19 continue de mettre à mal le marché chinois

Face à la Covid-19, le gouvernement chinois a imposé un confinement strict à des millions de Chinois pour enrayer coûte que coûte l’épidémie. Les conséquences de la pandémie et de ces mesures ont des impacts majeurs sur toute l’économie du pays, en particulier sur le marché du porc.

Le président chinois Xi Jinping s’est engagé dans une politique « 0 Covid » en Chine, et pour répondre à la recrudescence des cas dans la ville de Shanghai, de nombreux quartiers ont été placés sous confinement fin mars pendant une durée indéterminée. Des mesures de confinement plus ou moins strictes touchent près de 26 millions de Chinois habitant dans le cœur économique de la Chine. Elles se sont déployées selon trois statuts : un confinement strict avec interdiction de sortie du logement, un confinement contrôlé avec la possibilité de sortir dans l’enceinte des résidences, et un confinement plus souple avec l’autorisation de se déplacer dans un périmètre et une durée limitée.

De telles dispositions au sein du centre financier, manufacturier et maritime de la Chine ont inévitablement entraîné des répercussions majeures sur l’économie du pays, et plus particulièrement sur le marché du porc. Les impacts touchent le commerce et les approvisionnements en porc, la demande des consommateurs chinois, engendrant une inflation dans le pays.

Perturbations logistiques majeures et limitation des approvisionnements

Pour de nombreux acteurs du commerce, Shanghai constitue un emplacement idéal pour réceptionner puis redistribuer les produits issus de l’importation dans tout le pays. Le blocage d’un des plus grands ports chinois pendant de nombreuses semaines a irrémédiablement entrainé des perturbations conséquentes dans le secteur des logistiques maritime et terrestre et dans les approvisionnements en divers produits, dont des produits du porc. Face au manque de personnel, confiné dans leur logement, la prise en charge des flux de marchandises arrivant à Shanghai a enregistré beaucoup de retard, et a provoqué un engorgement massif des navires dans le port. Au-delà des retards liés au personnel, l’obligation de tests de dépistage à la Covid-19 sur les denrées importées n’a fait qu’aggraver cette situation. Dès le 1er avril, les produits alimentaires réfrigérés ou congelés devaient obligatoirement subir des inspections dans le but de garantir l’absence de Covid. Le temps de réalisation et de traitement des tests a été générateur de retards bloquant des centaines de navires en amont du fleuve Yangtze.

Carte du trafic maritime autour du port de Shanghai
Source : Marine Traffic, les points ronds symbolisent les navires à l’ancre

Une fois les produits déchargés, les acteurs du commerce se sont aussi retrouvés confrontés au manque de chauffeurs routiers pour acheminer les marchandises dans tout le pays bloquant là aussi la chaine logistique.

Les importations en produits du porc (viandes et abats), qui étaient déjà en perte de vitesse, ont de ce fait de nouveau été limitées. Au premier trimestre, les importations en porc de la Chine se sont repliées de près de -58% par rapport à 2021, et le bilan pourrait s’alourdir au second trimestre. La prévision des experts de l’USDA réalisée en avril dernier envisageait une baisse des importations en porc de -19% en 2022 par rapport à 2021, ce chiffre pourrait dorénavant être dégradé.

Une demande mise sous cloche

Le marché chinois s’est donc retrouvé face à des approvisionnements en porc limités, à la suite des perturbations logistiques, mais l’affaiblissement de la consommation a permis de limiter la hausse des prix du porc. En effet, l’instauration d’un confinement strict pour des millions de personnes a restreint la consommation des produits du porc, en particulier issus des importations. Les prévisions de l’USDA qui estimaient une croissance de la consommation de porc de l’ordre de 5,2% en 2022 par rapport à 2021, pourraient être revues à la baisse.

 A Shanghai, les livraisons pour les quartiers strictement confinés ont été interdites. Les Chinois confinés chez eux comptaient ainsi sur les paniers alimentaires du gouvernement, gratuits mais à contenus variables, et ne contenant pas de viandes importées. Dans les autres quartiers, les courses en magasin n’étaient autorisées pour certaines zones seulement et sous limitation de fréquence et de durée d’achat. La situation épidémique a pu favoriser l’utilisation du e-commerce, déjà inscrit dans les habitudes des consommateurs chinois, mais les disponibilités en divers produits restaient limitées.

Les freins à la consommation se sont aussi illustrés aussi dans d’autres villes en Chine, toujours en lien avec la mise en place de mesures pour limiter la propagation de la Covid-19. A Pékin, à partir du 1er mai, et ce pendant une durée indéterminée, les restaurants ne pourront accueillir leurs clients sur place. Les traiteurs et restaurateurs tentent de s’adapter à ces dispositions en installant des stands et étals dans la rue. Certains grands noms de la restauration se sont prêtés au jeu, comme le leader de la cuisine du Sichuan en Chine Meizhou Dongpo, ou encore des chaines de restauration rapide. Cependant, les acteurs de la restauration confirment que l’installation de ces étals ne suffira pas à compenser les baisses de consommation et de fréquentation. L’impact économique lié à l’interdiction d’accueillir des clients à table est majeur, d’autant plus que ce secteur souffre des conséquences du Covid-19 depuis maintenant plus de deux ans. A plus long terme, certains économistes alertent sur le fait que la demande en produits du porc pourrait rester morose en raison des incertitudes économiques futures.

L’économie chinoise touchée par l’inflation

Les différents problèmes d’approvisionnement et de logistique entrainent in fine une accélération de l’inflation en Chine. En avril, les prix à la consommation ont bondi à 2,1% par rapport à l’an dernier, contre +1,5% en mars. Les chiffres du mois de mai devraient être encore plus forts. La légère reprise des cours du porc a joué dans ce mouvement inflationniste, compte tenu de l’importance du porc dans l’économie chinoise. En mai, le prix du porc a enregistré une hausse de près de 12% par rapport au mois dernier.

La hausse des coûts de transport et d’approvisionnement pour les industriels chinois est à l’origine de l’accélération de l’inflation. Ces derniers ont répercuté les surcoûts en aval de la filière, sur les prix à la consommation. L’amélioration de la situation sanitaire qui se dessine fin mai laisse entrevoir de meilleurs horizons commerciaux et économiques, mais la Chine devra de nouveau se relever de ces nombreuses perturbations. Pour ce faire, la Banque centrale chinoise et le gouvernement ont annoncé la mise en œuvre de diverses mesures pour soutenir la croissance. Les entreprises de la filière porcine affectées depuis 2018 par des crises économiques majeures attendent ardemment ces soutiens.

Léger ralentissement de la croissance de la production prévu en 2022

Selon les estimations de l’USDA, la part de la Chine dans la production mondiale est de 47% en 2021. Après la forte baisse de la production liée à la fièvre porcine africaine en 2018-19, la Chine a entamé une restructuration majeure de son système d’élevage. Les fermes familiales, dites de basse-cour, ont été progressivement remplacées par des grands complexes détenant souvent plusieurs milliers de porcs. Le (re)peuplement des élevages et le démarrage de ces nouveaux complexes a permis une écrasante croissance de la production nationale avec+ 31% en 2021 par rapport à 2020, soit une hausse de 11,2 millions de tonnes. Le rythme devrait ralentir en 2022 (+7 % par rapport à 2021), mais permettre à la Chine de produire plus de 51 millions de tonnes annuelles.

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